Carte blanche à Alain Lefebvre – Ce que m’a apporté l’auto-publication

Carte blanche à Alain Lefebvre – Ce que m’a apporté l’auto-publication

Carte blanche à Alain Lefebvre – Ce que m’a apporté l’auto-publication

(Cet article a été écrit par notre ami et collègue Alain Lefebvre – que nous remercions d’avoir accepté notre invitation – et s’inscrit dans une rubrique toute récente : « Carte blanche à… ».
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Avant d’entrer dans le vif du sujet (l’autoédition), je crois utile de me présenter. Et, pour cela, je vous propose de revenir – rapidement – sur mon « parcours d’auteur »…

Mon parcours d’auteur

J’ai commencé à écrire il y a vingt ans tout juste. Pas par vocation (encore que, j’ai toujours eu « l’écriture facile ») mais parce qu’un directeur de publication d’Armand Colin me l’a proposé. Il voulait que j’écrive un livre sur le modèle client-serveur, le sujet chaud du moment en informatique. J’étais alors le spécialiste (autoproclamé !) de ce modèle et je donnais des conférences sur le sujet pour expliquer (on disait beaucoup « évangéliser » à cette époque) l’intérêt de cette architecture aux directeurs informatique. Écrire un livre me paraissait être un défi considérable (par rapport aux conférences) mais mon contact chez Armand Colin sut assez facilement me convaincre. Après des mois de travail intensif, le premier jet était là, complet avec même des schémas explicatifs pour illustrer. La première édition fut décevante dans la mesure où les schémas apparurent « noircis » et où la correction avait été trop légère.
La seconde édition fut la bonne et l’ouvrage remporta même le prix AFISI du meilleur livre informatique 1994. Le livre se vendit plutôt bien mais je n’étais toujours pas prêt à répéter l’expérience qui avait été laborieuse.

Et puis, ayant constaté l’impact de ce premier livre sur ma carrière, j’ai récidivé, une fois, deux fois, j’étais mordu !

Bref, j’ai rédigé et publié un livre plus ou moins tous les deux ans avec différents éditeurs comme Armand Colin et Eyrolles. Mais il s’agissait toujours de livres « techniques », lié à mon domaine d’origine : l’informatique.

À partir de 2003, j’ai voulu publier mon premier livre de fiction (un roman de SF, « Perdu dans le temps ») et là, j’ai constaté que le monde de l’édition était très conservateur et cloisonné. Mes éditeurs habituels ne pouvaient rien pour moi et non, ils ne connaissaient personne susceptible d’éditer mon roman (de la fiction ? pouah !). Alors que j’étais plutôt le bienvenu lorsque je proposais mes livres « techniques », j’ai réalisé que cela ne comptait pour rien si j’avais la prétention (absurde !) de faire aussi de la fiction… Là, personne ne voulait de moi ou de mon livre.

Bref, après un détour via lemanuscrit.com (je recommande d’éviter plutôt cette adresse…), j’ai finalement pu publier « Perdu dans le temps » grâce à M21 éditions qui en fit un livre numérique vendu en 2006 sur le site mobipocket.com, et ce bien avant que les ebooks soient à la mode. Expérience intéressante mais diffusion limitée (à l’époque, forcément…). Cela m’a tout de même conduit à m’acheter une première liseuse numérique (une Cybook) et à commencer à faire mon expérience du domaine.

Ma dernière expérience avec le secteur de l’édition vaut d’être contée : en 2008, j’ai l’idée de publier un guide pratique permettant de découvrir le Simracing (courses automobiles simulées sur Internet). Et, pour cela, j’essaye de prendre contact avec Pearson France car cet éditeur publiait déjà des guides sur Flight Simulator, entre autres. Mais mes nombreux messages email restent sans réponse… Jusqu’à ce que j’en parle à mon ancien éditeur M21 dont le directeur me dit « oh mais je connais le directeur général de Pearson… Veux-tu que je lui en parle ? ». Aussitôt dit, aussitôt fait et, bingo, je reçois un appel de Pearson dès l’après-midi et un contrat le surlendemain !

Comme quoi, ceux qui prétendent que tout est affaire de relations (dans le monde de l’édition) n’ont sans doute pas tout à fait tort…

Le livre papier sur le Simracing se vendit raisonnablement bien mais sans doute pas encore assez pour qu’il intéressât durablement Pearson France qui n’étudia même pas la possibilité de le traduire en anglais (là où le marché était évidemment bien plus vaste pour un ouvrage de ce type).

Très classique n’est-ce pas ?

C’est à travers ces expériences (et quelques autres, j’aurais pu aussi parler des livres de mon épouse…) que je me suis fait mon opinion sur le monde de l’édition : rien de bon à en attendre si vous êtes un auteur qui veut garder sa liberté de création. Sinon, j’en serais toujours à rédiger des livres techniques et à toucher des clopinettes. Car, si l’impact d’un livre sur votre renommée professionnelle est incontestable (et je ne peux que recommander cette démarche pour tous les professionnels un peu ambitieux…), le résultat financier lui, est plus que médiocre : à moins d’en vendre quelques dizaines de milliers par an, n’espérez pas en faire votre activité principale.

La liberté, voilà la vraie bonne raison d’écrire et de s’auto-publier !

Alors, si ce n’est pas pour l’argent, à quoi bon écrire ?

Mais pour le plaisir justement !

Et là, il faut pouvoir garder sa liberté de création… Donc, rester à l’écart des éditeurs obtus (oui, obtus, il n’y a qu’à voir en France comment le numérique est méprisé car incompris) et/ou malhonnêtes (j’ai vu des contrats récents, issus de « grandes maisons » avec des noms prestigieux, proposer des « contrats d’auteur » délirants : il fallait payer de sa poche les 500 premiers exemplaires et « l’auteur » avait enfin la possibilité de toucher des droits sur les ventes suivantes, c’est-à-dire, au-delà des 500 premiers qu’on devait tout de même financer… À ce prix, autant faire de l’impression à la demande, c’est bien moins cher !). Sans parler du délai et de la difficulté à percevoir les clopinettes en question, quand il y en a…

J’ai véritablement découvert l’autoédition grâce au Kindle d’Amazon. J’avais déjà mis « Perdu dans le temps » sur Thebookedition.com (suite à une mauvaise expérience sur BOD. com, encore une adresse à éviter) mais ce n’était que de l’impression à la demande et la diffusion était très limitée (pas de présence dans les réseaux de librairie ni sur Amazon ou la Fnac).
En janvier 2010, je fais donc une première expérience de KDP (Kindle Digital Publishing) sans trop y croire, pour voir, au cas où… Mon livre en français était noyé au milieu des titres en anglais mais c’est justement cela qui l’a sauvé : les clients francophones de la Kindle store n’avaient pas grand choix de livres en français et c’est sans doute pour cela que mon titre a fini par décoller !

Quelques commentaires favorables ont aussi aidé à améliorer le ranking et le mouvement pris progressivement de l’ampleur, à ma grande surprise… Depuis, quelques exemplaires par mois, puis quelques dizaines et enfin une ou deux centaines par mois (euh, 200 exemplaires vendus sur le Kindle Store, c’est mon record, c’est pas tous les mois, hein !), j’étais enfin dans la partie !

À partir de ce premier succès (tout est relatif), j’ai eu envie d’élargir la diffusion de mon roman-phare et je me suis mis en recherche d’un distributeur. En effet, être présent sur d’autres sites comme celui de la Fnac me paraissait être la suite logique pour assurer le succès de mon livre. Les quelques distributeurs numériques que j’ai alors contacté ne m’ont même pas répondu (s’occuper d’un auteur indépendant ? Et puis quoi encore ?). Finalement, seul Immatériel m’a accueilli sans faire de manières et, clairement, je suis bien content de les avoir trouvés (et là, c’est vraiment une adresse que je recommande). Ceci dit, avec le recul que j’ai après presque trois ans d’autoédition, le constat est le suivant :

– L’impression à la demande, c’est bien pour avoir quelques exemplaires papiers de ses propres livres, mais on n’y vend pas grand-chose.

– Être présent sur les autres plateformes qu’Amazon (à la sortie de l’iPad, être présent sur l’iBooks Store était du dernier chic…), c’est bien pour l’ego mais, clairement, pour chaque livre que j’écoule via Immatériel, j’en vends dix de plus sur Amazon !

Bref, force est de constater qu’Amazon domine le marché de la tête et des épaules avec sa gamme Kindle et ses Kindle Stores bien faites et bien fournies et, à mon avis, vu comment ses adversaires se débrouillent, ce n’est pas près de changer !

Vivant une partie de l’année en Floride, j’ai pu y constater que le Nook de Barnes & Noble n’était pas ridicule face au Kindle. J’ai donc aussi publié mes livres sur Pubit.com, l’équivalent de KDP par Barnes & Noble (application tout aussi bien réalisée que celle de KDP d’ailleurs) mais, pour le moment, avec très peu de résultats (il semble que les lecteurs francophones soient plus nombreux sur Kindle que sur le Nook !). J’ai aussi fait le test de Smashwords, mais peu convaincant…

Aujourd’hui, j’ai 14 titres publiés sur KDP et autant sur Immatériel (qui me permet d’être présent sur Ibooks, Kobo, Fnac, etc.) et mes ventes (tous les titres cumulés) commencent à représenter quelques centaines par mois. Pas de quoi pavoiser mais assez pour se dire que mes livres sont appréciés, au moins d’un petit cercle de connaisseurs (et puis quoi encore ? tes livres se vendent parce qu’ils ne sont pas chers, point !).

Alors, une fois ce tour d’horizon accompli, si on en venait au principal, hein !

Ben oui, vas-tu enfin nous dire ce que t’apporte l’autoédition, en-dehors de tes minables chiffres de vente ?

Hum, c’est si gentiment demandé que je vais me faire un plaisir de répondre… Pour faire court, l’autoédition m’apporte la liberté, tout simplement. C’est tout mais c’est énorme.

Si j’ai envie de pousser mon livre de SF et de le décliner en une vraie saga (on peut rêver), ça ne dépend que de moi. À partir du moment où j’ai la compétence nécessaire pour le mettre en forme et le mettre en ligne, nul ne peut me le refuser et son succès éventuel ne dépend que de la qualité de son contenu, point. Cela paraît évident, cela n’a l’air de rien mais c’est essentiel. Je ne dépends d’aucun « système » et je n’ai aucune contrainte à respecter autres que techniques. C’est moi qui fixe les règles, c’est moi qui choisis la couverture de chacun de mes livres (en fait, c’est même moi qui la compose !), c’est moi qui définis le prix de vente et ainsi de suite. Grâce à l’autoédition, je suis le maître du monde (et voilà qu’il s’emballe, vite sa piqûre !).

Bon, l’autoédition implique aussi qu’on a tout le boulot à faire soi-même : venant du monde de l’informatique, mettre en forme un fichier ePub, générer une couverture au format Tiff ou autres opérations obscures de cet ordre ne me posait pas de problème. Mais c’est vrai que c’est parfois lourd et qu’on n’imagine pas le nombre d’obstacles à surmonter avant de voir son ouvrage sur les rayons virtuels de la Kindle Store !

Il y a quelque temps, j’avais même publié un livre intitulé « Publier pour le Kindle et pour l’iPad », pour faciliter la démarche aux débutants dans le domaine… Mais j’ai vite retiré cet ouvrage de la vente pour deux raisons :

1- je n’avais pas assez de temps pour le tenir à jour avec une nouvelle édition tous les trimestres (vu la vitesse d’évolution du secteur, il aurait fallu tenir ce rythme).

2- je me suis aperçu que cet ouvrage n’était pas suffisant pour aider les novices… Non pas que le contenu en fût insuffisant (mes livres sont impeccables, mon cher !) mais plutôt parce qu’il supposait que toutes les notions techniques présentes étaient déjà connues… Ce qui est loin d’être le cas !

Grossièrement, les auteurs sont créatifs mais pas forcément doués techniquement (bien souvent, la technique les rebute, ce sont des artistes quoi !). De l’autre côté, les techniciens, eux, maîtrisent la chose mais ne sont pas forcément créatifs (difficile d’être doué sur tous les tableaux…). Bref, mon ouvrage était nécessaire mais pas suffisant pour faire le pont entre les deux mondes.

C’est pour cela qu’on voit fleurir des offres d’accompagnement dans l’autoédition, comme le proposent nos duettistes de M.I.A.
Je dois avouer que cette idée m’a effleuré aussi mais j’y ai finalement renoncé car je préfère consacrer mon temps disponible à mes livres plutôt que de me sacrifier pour les livres des autres. Je réserve donc cette activité « d’éditeur » à ma petite famille (ma femme écrit déjà et mes fils commencent à s’y mettre…).

Revenons au cœur du sujet : la liberté d’expression. Elle est vraiment à la base de mon travail d’auteur car j’ai une démarche de touche-à-tout… Oh, je sais combien cette tendance est honnie en France, patrie des spécialistes pointus !

Oui, j’ai pour ambition de publier au moins un livre dans chaque domaine littéraire, par goût et par défi. J’ai déjà bien labouré le domaine des livres techniques (le dernier avec le livre sur les réseaux sociaux, paru en 2005) et je n’ai pas prévu d’y refaire un détour.
J’ai aussi visité le secteur des guides pratiques avec celui sur le Simracing (dont j’ai repris les droits et dont j’assume désormais la seconde édition, en numérique bien sûr !).
Et, bien entendu, j’ai aussi exploré le domaine de la fiction avec « Perdu dans le temps » (la saga n’est pas encore terminée, loin s’en faut) et « Hacking » (qui commence enfin à décoller… Il faut avoir la patience de laisser un livre faire son trou) ainsi qu’un livre historique avec « Cow-boys contre chemin de fer », une histoire de l’informatique moderne aussi complète que possible (mon plus gros travail à ce jour : plus de quinze mois de travail à deux auteurs !).

Mais ce n’est pas tout : j’ai aussi coché la case du récit autobiographique avec « Racing », de la biographie avec « Soheil Ayari, un pilote moderne », de la galerie de portraits avec « La malédiction des champions du monde de F1 » et même de l’essai politique avec « Cette révolte qui ne viendra pas ». Vais-je me contenter de cette diversité encore un peu timide ?

Certainement pas !

J’escompte bien produire également un recueil de nouvelles, un recueil de poésies (à ma manière hein !) et même un manuel éducatif (je ne sais pas encore sur quoi mais je trouverais bien, ma femme me fait bien travailler sur ses propres livres éducatifs, ça laisse des traces !), rien ne va m’arrêter !
Voire même (et pourquoi pas ?) un livre sur le développement personnel. Oui, j’irai jusque là (et toutes les suggestions des segments littéraires que j’aurais oubliés sont les bienvenues !).

Sérieusement, sans vouloir cocher à tout prix toutes les cases, j’aimerais bien pouvoir aborder tous les genres en toute liberté. Si ce n’est pas là l’essence même de la liberté de création, alors qu’est-ce ?

Donc, oui, seule l’autoédition me permet cela aujourd’hui et c’est bien pour cela que je compte bien y rester fidèle un bon moment !

Surtout que les moyens à disposition des auteurs indépendants ne cesse de s’améliorer (Createspace, désormais disponible en dehors des USA, offre un bon service d’impression à la demande avec, cerise sur le gâteau, possibilité d’avoir ses livres directement disponibles sur Amazon) ainsi que leur statut (aux USA au moins… En France, il va falloir encore du temps !).

Suite aux nombreux succès sur la Kindle Store, les auteurs indépendants sont enfin reconnus et même le New York Times en parle désormais…

OK, liberté de création (un luxe de bourgeois pourraient penser certains !) et c’est tout ?

Non, il y a aussi et c’est tout aussi important le contact avec les lecteurs. Comme le disait Dalida « c’est mon public qui m’a tout donné »… Sans aller jusque-là, avouons tout de même que, si on écrit, c’est pour être lu… Eh oui !

Sans lecteur, l’auteur existe mais il est diminué, affaibli, pas tout à fait accompli. Pas besoin d’avoir des milliers de témoignages pour se convaincre que votre création a été utile, agréable à quelques-uns mais, croyez-moi, la moindre remontée venant de vos lecteurs se savoure comme un mets sublime et délicat.

Et, encore une fois, c’est la publication numérique qui permet, organise même, la meilleure des rencontres entre l’auteur et son public. Grâce aux commentaires sur Amazon (encore une fois, c’est vraiment la plateforme où passe la plus grande activité, je n’y peux rien, c’est ainsi !), on peut vraiment voir, sans filtre, les réactions des lecteurs (et lectrices, of course !). On monte au ciel quand elles sont positives, on est au fond du trou quand elles sont négatives.

Ah oui, c’est un truc qu’il faut aussi raconter dans la longue galère qu’est aujourd’hui le parcours d’un auteur indépendant (un peu de mélo, ça fait du bien à l’autopromotion coco !) : comment vivre (et survivre !) aux critiques négatives. Car là, ce ne sont pas des professionnels snobs et impertinents (au sens propre du terme) qui vont déchirer votre cher bouquin mais bien des vrais lecteurs, des clients qui ont payé pour vous lire !

Et là, croyez-moi, ça peut faire mal, très mal… C’est pourquoi les bonnes critiques vous font un bien fou (il faut tout de même préciser qu’une seule bonne critique permet de surmonter un paquet de critiques négatives et heureusement, sinon, j’aurais déjà arrêté depuis longtemps !).

Je me dois de dire un grand merci à tous ceux qui ont lu un de mes livres un jour et encore plus à ceux (bien trop rares à mon goût) qui, en plus, ont laissé un commentaire sur les librairies en ligne !

Ce contact avec les lecteurs, il faut le chérir et l’entretenir autant que faire se peut. Sur Amazon, on peut désormais répondre aux critiques (hélas, on ne peut pas encore supprimer les critiques négatives… encore des progrès à faire Monsieur KDP !) et je ne me prive pas de le faire.

Mais il ne faut pas se contenter de cela, il faut faire plus et mieux : avoir une page sur Facebook par ouvrage et même, quand c’est justifié, un site dédié pour vos titres phares…

Bien entendu, tout cela demande des moyens, des compétences et du temps me direz-vous… Pas tant que cela : beaucoup des ressources nécessaires sont désormais gratuites, les compétences requises sont accessibles (maîtriser un blog wordpress, c’est vraiment à portée de tout le monde, non ?), reste la question du temps à y passer…

C’est vrai que l’activité d’auteur est très exigeante, chronophage même. Oui, écrire prend du temps, beaucoup de temps et c’est encore pire quand il s’agit de s’occuper de la « promotion » de ses livres car, alors, on culpabilise de ne pas être en train d’écrire !

Et tout cela pour des revenus ridicules… Qui prétendra que les auteurs ne sont pas des passionnés, dans leur immense majorité ?

Finissons sur une note positive : l’appétit vient en mangeant dit-on !

Et donc, j’ai décidé de donner toutes ses chances à ma saga « Perdu dans le temps » : je viens de publier une version en anglais du tome 1. J’ai trouvé un traducteur grâce au site mytranslation.com et je n’hésite pas à tenter de faire mon trou sur un grand marché, celui des anglophones.

Merci de m’avoir lu jusqu’au bout et, promotion spéciale pour les lecteurs du blog M.I.A, vous pourrez trouver des exemplaires gratuits de « Perdu dans le temps » tome 1 & tome 2 à cette adresse (dans tous les formats) pendant une semaine…

Bonne lecture ! 🙂
Alain Lefebvre

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bye bye

(Cet article a été écrit par notre ami et collègue J.Heska – que nous remercions d’avoir accepté notre invitation – et s’inscrit dans une nouvelle rubrique : « Carte blanche à… ».
Vous êtes auteur, blogueur littéraire, vous appréciez notre ligne éditoriale et vous avez vous aussi envie de venir mettre votre grain de sel sur ce blog ? Contactez-nous !).

Lorsque le collectif M.I.A m’a sympathiquement convié sur ce blog, sachant que je voulais depuis longtemps cracher ma rancœur sur le monde de l’édition (mais étant bien trop lâche pour le faire sur mon propre site web) je me suis dit que je tenais là une occasion en or !

Laissez-moi donc, cher visiteur, vous esbaudir en vous contant une belle histoire : Il était une fois un jeune auteur plein d’espoir et de naïveté qui croyait en son talent. Après des années de galère, d’espoirs déchus, de fausses promesses, cet ingénu pensait enfin accéder à la gloire éternelle en signant un contrat avec un éditeur (un vrai de vrai, pas un de ces arnaqueurs qui pullulent sur le net). On lui colla une belle équipe avec une attachée de presse, un graphiste, un correcteur, un distributeur, et plein d’autres gens censés faire de son roman un succès. Le petit ouvrage sans prétention, Pourquoi les gentils ne se feront plus avoir, sortit le jour de la Saint Valentin. Notre petit auteur se démena comme un beau diable pour en faire la promotion, et eut même la fierté de voir estampillé son bébé « best-seller » 2011.

Bonheur parfait ? Pourtant un an plus tard, dégoûté par le milieu, il décida de tout plaquer et d’auto-éditer son second ouvrage, On ne peut pas lutter contre le système.

Pour quelles raisons ? Que s’était-il passé ? Pourquoi a-t-il décidé de quitter son éditeur ? Voilà une réponse poing par poing (rho, mais oui, la faute d’orthographe est volontaire !)

Un éditeur, ça ne fait pas son boulot

Désacralisons immédiatement l’image de l’éditeur passionné caché derrière une pile de manuscrits recherchant fébrilement sa pépite. Un éditeur, c’est un chef de projet. Il pourrait bosser dans l’alimentaire, dans la pharmacie, ou dans les papiers toilette. Mais là, il sévit dans une maison d’édition.

Son rôle est d’être l’interface des professionnels qui vont réaliser un bout de prestation (le comité de lecture, le diffuseur, l’attaché de presse, le distributeur, etc.), d’assurer la cohérence de l’ensemble, vérifier que le planning est tenu, trouver des solutions en cas de conflits. Or, si le chef de projet ne s’acquitte pas bien de ces tâches, c’est tout le projet qui part en vrille : le graphiste massacre la couverture, le correcteur bâcle son boulot, l’imprimeur imprime le roman sur du papier toilette (décidément), le distributeur le traite par-dessus la jambe, l’attachée de presse va siroter des cocktails sans même penser à faire son travail, etc.

L’incompétence est difficile à déceler chez un chef de projet, car elle ne se voit que sur le long terme. Et inutile de signaler que la profession regorge de ce genre de personnages, people, « fils de », starlette, « coopté », etc.

Notre jeune auteur se retrouva ainsi fort marri lorsqu’il constata que son éditeur, l’homme à qui il avait confié son bébé, l’homme qui l’avait sélectionné, lui, parmi des milliers de manuscrit, qui avait investi des sommes non négligeables, et qui devait normalement se dévouer corps et âme, n’avait en fait jamais pris la peine de lire son roman et préférait avaler des petits fours dans les dîners mondains pour se faire brancher par de jeunes midinettes prêtes à tout pour publier leur torchon. Après s’être longuement interrogé, notre béotien prit son courage à deux mains et osa interpeller sur cet apparent paradoxe. Hélas, il n’obtient jamais de réponse réellement satisfaisante.

Un éditeur, ça ne permet pas d’être diffusé en librairie

Encore une image sacrée que je foule du pied avec un plaisir sadique ! L’erreur de tous les petits nouveaux lors de leur première publication : confondre éditeur et distributeur. Car si être édité chez Gallimard et consorts assure un minimum de visibilité en librairie (encore que, tout le monde n’est pas Houellebecq ou Marc Lévy), trouver un petit éditeur de province n’assure pas du tout ce Graal, loin de là !

C’est le distributeur qui place les romans dans les Cultura de France, personne d’autre. Lui qui va faire, par l’intermédiaire de ses commerciaux, la promotion des livres. Lui qui va permettre un placement en tête de gondole, sur tablette, ou relégué au fond des rayons. Lui qui va empêcher un turn-over d’une semaine.

Bref, lui qui tient le destin des auteurs entre ses mains. Si la maison d’édition n’a pas de distributeur (ou un petit distributeur présent uniquement dans 10 librairies de Bretagne), cela ne sert à rien d’insister, car ce n’est guère mieux que de l’auto-édition.

Notre jeune auteur fut fort aise, malgré son erreur initiale de ne pas s’être renseigné, de bénéficier des services d’un grand distributeur (dont le nom rime avec « machette » et qui est en fait une petite « hache ». Oui, c’est bien Hachette). Au prix d’efforts insurmontables auprès de son éditeur pour que celui-ci accepte de faire son travail, il réussit contre toute attente à être exposé en librairie et à percer ! Quelle joie, quelle félicité !

Las, son succès devint malédiction. Les livres partirent comme des petits pains. La rupture de stock survint moins de trois semaines plus tard. L’éditeur n’avait pas prévu de réapprovisionnement. Disparition des tablettes, oubli. L’éditeur incompétent mit plus d’un mois pour faire jaillir des rotatives de nouveaux exemplaires. Le distributeur n’en voulut plus. C’était fini. « De toute manière, on a rien perdu, le turn-over pour un primo-romancier est aussi important que celui d’un rouleau de papier toilette dans un fast-food lors d’une épidémie de gastro », rétorqua l’éditeur. Bien qu’il eut probablement raison, cela n’empêcha pas notre auteur de vouloir lui arracher les jambes.

Un éditeur, ça négocie très mal le virage numérique

Il suffit de se connecter sur les plates-formes numériques pour se rendre compte de l’arnaque généralisée. Un livre numérique au prix d’un livre papier ! De qui se moque-t-on ? On ne peut pas mettre sur un pied d’égalité (tarifaire) un livre fait avec de vrais arbres (donc un support matériel qu’il va falloir fabriquer, acheminer, mettre en rayon, etc.) et un contenu dématérialisé multipliable à l’infini. Le consommateur qui a déboursé 100 euros pour son lecteur numérique (Kindle ou Kobo), ne le tolère plus, et il a bien raison !

Les éditeurs auront beau tenter de se justifier, ils n’ont aucune excuse : l’énorme marge bénéficiaire est bien monopolisée par eux-mêmes. On se dirige tout droit vers une paupérisation des auteurs acceptant de telles conditions. Et lorsque le système s’effondrera (tout comme celui des maisons de disques il y a quelques années), ce sont encore les petits écrivains qui paieront les pots cassés. Mais point d’inquiétudes ! Marc Lévy, Bernard Werber et Guillaume Musso sentiront à peine la vague passer.

Il existe également certains esprits chagrins pour dire que le livre numérique ne marchera jamais en France. Il ne faut pas se leurrer (et n’en déplaise aux irréductibles qui déclament leur amour poétique du support « j’adore m’enivrer de l’odeur du papier (toilette), du craquement des feuillets sous mes doigts, bla bla »), la révolution du livre numérique est en marche et s’accélère. En tant qu’auteur, rater le coche parce que les éditeurs n’ont pas encore compris la puissance du dispositif, c’est idiot.

Il ne faut pas s’étonner ni déplorer que des géants comme Amazon s’engouffrent dans la brèche béante laissée par la sottise d’une industrie vieillissante.

Notre jeune auteur, malgré toute sa motivation, ne réussit jamais à faire baisser le prix de son roman numérique. Malgré les beaux graphiques qu’il transmit (et indiquant en résumé qu’il valait mieux en vendre 10 à 2.99 € qu’un seul à 14,95 €), l’éditeur ne voulut rien entendre… Sa frustration n’en fut que décuplée quand il constata que des outils disponibles sur Amazon (Apple, c’est encore un peu compliqué) permettait une diffusion rapide, efficace, peu onéreuse, et même d’augmenter ses marges !

Un éditeur, ça prend trop de marge, ça paye mal, et ça arnaque

Reconnaissons là un brin de mauvaise foi (juste un doigt). Car l’éditeur n’est pas celui qui pique le plus dans l’assiette, le distributeur et le libraire se goinfrent largement au passage. Le résultat reste le même, car l’auteur, tout comme l’agriculteur, nourrit grassement une chaîne de professionnels alors qu’il parvient à peine à joindre les deux bouts. Je faisais un calcul économique dans un de mes articles précédents (hop, un lien vers mon blog) en indiquant que pour assurer un salaire décent, un auteur devait arriver à vendre au moins 15 000 exemplaires de son roman. Et oui, car à seulement 8 ou 10% de marge sur le prix TTC du roman, il faut en fourguer du papier pour avoir de quoi manger. Objectif que seuls quelques dizaines de romanciers atteignent dans notre beau pays… Pour les autres, ils ont de quoi se consoler en achetant un paquet de croquettes pour le chat (ou un rouleau de papier toilette) de temps en temps.

De même il faut savoir que l’éditeur ne paye, en général, qu’un an après la publication officielle du roman (oui, vous avez bien entendu, un an, il y a de quoi mourir 365 fois avant de voir son travail rétribué). Dans quelle profession se permet-on de payer après un délai aussi long ? Vous vous voyez faire la même chose chez votre boulanger ?

Et puis, je passe sur le fait que l’éditeur est le seul à connaître réellement les chiffres de vente, qu’il peut les trafiquer selon sa propre volonté, que c’est souvent un très mauvais payeur, voire un pas payeur du tout…

Notre jeune auteur (encore lui), constata que, malgré son beau succès, il n’allait pas pouvoir sniffer de la cocaïne sur le capot de sa Ferrari (tout en se frottant à un mannequin suédois du nom de Grünt) dès la semaine prochaine. Déjà parce que son niveau de vente, bien que très satisfaisant malgré les problèmes précédents, ne lui permettait de toucher que 4 000 euros (ce qui est très bien pour mettre un peu de beurre dans les épinards, mais largement insuffisant pour en vivre), mais surtout qu’exactement un an et un jour après la publication de son roman, son éditeur ne donna plus jamais signe de vie…

Un éditeur, ça ne comprend rien à l’art

Un éditeur est un vendeur. Point. Qu’il vende des bananes, des voitures, du papier toilette, ou des bouquins, c’est pareil. La vision romantique du passionné relayé par les médias est utopique. Et même si elle existait vraiment, il y a des gens au-dessus (directeur éditorial, comité de direction, actionnaires, bref des commissions remplis de vilains capitalistes) qui le ramèneraient à la réalité économique.

Une maison d’édition est une entreprise qui n’a rien de philanthropique (et on le sait d’autant plus quand on voit comment est traité le personnel), elle qui doit faire de l’argent : elle raisonne en termes marketing, en communication, en ventes. Un auteur qui vend mal est poussé vers la porte de sortie. Un auteur qui vend est chouchouté. Dès lors, on assiste naturellement à un mouvement d’homogénéisation culturel. Comment peut-on raccrocher une réelle démarche artistique dans un tel contexte ? Les textes ambitieux ont du mal à se frayer un chemin, les auteurs sont encouragés à toujours faire la même chose, et je ne parle même pas de tenter un « genre » qui se vend mal…

Notre jeune auteur (toujours), enorgueilli par le succès de son ouvrage, fut fort flatté de recevoir des coups de téléphone d’autres éditeurs qui avaient bien apprécié son premier roman, et qui étaient prêts à publier sa seconde merveille. Il leur indiqua, plein de morgue, qu’il était justement en train de la rédiger, une œuvre radicalement différente, audacieuse, ambitieuse, sur une thématique forte. On lui expliqua gentiment qu’il valait mieux qu’il fasse un Pourquoi les gentils ne se feront plus avoir 2. Il indiqua qu’il n’avait pas forcément envie de développer le sujet, qu’il avait peur de se répéter. On ne le rappela pas.

Un éditeur, c’est trop compliqué à atteindre

Il suffit de voir les nombreux blogs de « wanabees » aigres qui fleurissent sur la toile pour se rendre compte de la difficulté à dénicher un éditeur. Beaucoup de concurrence, un système plus ou moins gangréné par le copinage, une volonté de ne plus prendre de risque, un contexte où plus personne ne fait vraiment son travail, bref, réussir à toucher un éditeur c’est presque aussi difficile que de trouver du papier toilette au fin fond de la Thaïlande.

Sachant qu’en plus il faut abattre des quantités phénoménales d’arbres pour envoyer un manuscrit format A4 en Times New Roman 14 avec double interligne (ce qui donne au final 300 pages pour « Oui-Oui va à la plage », alors je ne parle même pas d’une trilogie de fantasy), un coût prohibitif pour un envoi postal, et tout cela pour un livre qui sera à peine feuilleté, (dans plus de 99% des cas, l’éditeur ne donne d’ailleurs jamais suite), je trouve ça un poil trop fort de café.

Solution préconisée par de nombreux auteurs en herbe : se créer un réseau, fréquenter les cocktails parisiens, se faire connaître. Plus facile quand on habite Paris et que papa (ou maman, point de sexisme) subvient aux besoins…

Notre jeune auteur (promis, c’est la dernière fois), une fois la décision actée de quitter son éditeur arnaqueur, partit donc en quête d’un nouvel ami qui saurait faire son travail, saurait le distribuer correctement en librairie, saurait négocier le virage numérique avec intelligence, prendrait une marge correcte et ne serait pas trop difficile à atteindre. Las ! Il s’enquit des lunes et des lunes, mais sa recherche demeura vaine.

À bout de force, épuisé, il échoua au hasard de ses investigations au sommet d’une colline en Chine, demeure d’un vieux sorcier que les villageois du coin pensaient fou. Notre jeune auteur, en désespoir de cause, lui demanda conseil : où pourrait-il trouver la perle rare ? Le vieux sage désigna un bassin rempli d’eau et lui indiqua qu’il y trouverait sa réponse. Le jeune auteur s’y pencha, circonspect, mais n’y trouva que son propre reflet.

Et soudain, il comprit.

Sinon, il vécut heureux et eut beaucoup d’enfants (enfin pas trop quand même, c’est la crise)

Une prochaine fois, j’évoquerai les bonnes raisons qui m’ont poussé à m’auto-publier.

À bientôt les amis ! Et n’hésitez pas à acheter mes livres (je vous en prie) sur Amazon ici, ou ici. Et sinon, vous pouvez aussi me retrouver sur www.jheska.fr.

À propos de l’auteur : J. Heska

Écrivain à succès (enfin, un jour), J. Heska partage sa vie d’auteur entre ses nouvelles, son blog, www.jheska.fr, dans lequel il met en scène quotidiennement ses histoires extraordinairement banales et ses mondes idéaux, et ses romans. Son dernier thriller est sorti en juin.

Pour trouver ces livres, c’est sur Amazon, ici : Pourquoi les gentils ne se feront plus avoir, ou ici On ne peut pas lutter contre le système.

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À bientôt !
Hélène

 

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