L’auto-publication : partie 7 (statut juridique et fiscalité)

L’auto-publication : partie 7 (statut juridique et fiscalité)

L’auto-publication : partie 7 (statut juridique et fiscalité)

auto-publication2MAJ janvier 2017 : retrouvez notre série de tutoriels dédiés aux auteurs indépendants en vidéo sur notre chaîne YouTube.


(Partie 7 du dossier consacré à l’auto-publication, faisant suite à « L’auto-publication : partie 6 (démarches administratives) ».

Cette partie n’était initialement pas prévue au menu du dossier auto-publication, mais le nombre de mails que nous recevons à ce sujet m’a poussée à proposer un article qui reprend les questions les plus courantes de l’auteur auto-publié : « quel statut dois-je avoir », « comment déclarer mes revenus », « dois-je cotiser quelque part ? », etc.

Avant toute chose, je rappelle que cet article n’a d’autre but que d’être informatif, qu’il contient des explications qui seront peut-être obsolètes dans six mois et qu’il n’a pas la prétention de remplacer les conseils judicieux et personnalisés d’un avocat, d’un expert-comptable, de votre centre des Impôts ou de l’Urssaf… cette précaution étant prise, je vais donc tenter de rendre digeste un sujet qui donne la migraine à tout le monde. 🙂

La dernière partie de l’article présentera aussi un récapitulatif pour mieux comprendre les différences qui existent entre un auteur auto-publié et un auteur publié (chez nous, par exemple !), afin que vous puissiez mesurer les avantages et inconvénients de chaque statut.

Quelques rappels

Un auteur peut fournir ses travaux d’écriture dans le cadre de trois grandes catégories d’activité :

  • L’activité d’auteur auto-publié (l’auteur rédige, met en forme et distribue ses propres écrits, sans faire appel à un tiers pour tout ce qui touche à la publication de ses œuvres et sans céder ses droits de diffusion à quiconque).
  • L’activité d’auteur édité (il cède les droits d’édition et de diffusion de ses écrits, selon les termes d’un contrat précis qui encadre la relation entre les deux parties et a alors le statut officiel de « artiste-auteur »),
  • L’activité d’auteur salarié (il travaille contractuellement avec un lien de subordination vis-à-vis d’un employeur, de façon récurrente, par exemple pour des journaux, des collectivités, etc.).

Dans cet article, ce sont les deux premières catégories qui seront abordées (celle du salarié renvoyant tout simplement à la législation correspondante), en évoquant particulièrement trois points :

  • Quel statut juridique a l’auteur ?
  • Quelles cotisations sociales doit-il payer et à qui ?
  • Comment déclare-t-il les revenus perçus ?

Essayons d’y voir un peu plus clair… 🙂

Le statut juridique

La jurisprudence admet parfaitement qu’un auteur auto-publié (du moment qu’il déclare ses revenus) puisse tester son activité d’écrivain en-dehors de tout cadre juridique précis (sans avoir un statut autre que sa propre personne), mais – comme toute tolérance laissée à l’appréciation des juges – cette notion est bien floue…
Si un auto-publié vend 30 livres sans avoir de statut professionnel, personne ne viendra lui demander des comptes. S’il en vend 3000, il commencera à intéresser quelques services d’état…

En effet, avoir un statut juridique bien déterminé n’a finalement qu’un intérêt (pour vous comme pour l’administration) : permettre d’officialiser votre activité et de vous soumettre à un régime social approprié, grâce auquel vous allez payer des cotisations sociales obligatoires.

Je commence donc par vous donner un premier conseil, afin d’éviter tout souci par la suite : si vous avez l’intention de développer votre activité d’auteur auto-publié et de la pratiquer de façon régulière (même en vendant peu de livres au début), n’attendez pas trop longtemps avant de sauter le pas du statut professionnel.
Par contre, si vous comptez n’écrire qu’un seul livre qui ne sera diffusé qu’auprès de vos proches, inutile de vous mettre martel en tête… vous ne finirez pas en prison !

Alors, quels statuts peuvent répondre aux besoins d’un auteur indépendant ?

  • Le plus couramment évoqué est celui de l’auto-entrepreneur, simple et rapide à mettre en place (qui fait partie de la catégorie des « entreprises individuelles »).
  • D’autres formes de structures unipersonnelles, comme l’EURL ou la micro-entreprise peuvent également vous convenir.
  • Si vous préférez les structures collectives (en mettant votre conjoint ou votre meilleur ami dans le coup !), une SARL ou une association peuvent aussi répondre à vos besoins.

Attention ! Dans ces deux derniers cas, vous aurez un contrat d’édition qui lie votre entreprise à votre propre personne (en tant qu’auteur édité), ce qui fait que vous basculerez finalement dans la deuxième situation évoquée en préambule, ce qui commence à compliquer un peu les choses… 🙂

Pour faire votre choix, je vous invite à consulter toute la documentation officielle de l’APCE, qui présente de façon claire les avantages et contraintes de chaque forme juridique.

Pour les besoins de cet article, je vais par contre partir du principe que vous choisissez le statut juridique d’auto-entrepreneur (détails sur cette page), car c’est à juste titre la forme le plus souvent choisie par les auteurs auto-publiés.

Attention, ce statut est envisageable pour une activité n’excédant pas 32 600€ (en 2011) de chiffre d’affaires (plafond qui concerne les activités libérales, comme celles des arts). Si vous écrivez un véritable best-seller, il vous faudra donc rapidement envisager une autre forme juridique ! 🙂

De plus, des informations contradictoires sont parfois données par l’administration pour une même question donnée : statut libéral ou commercial (plafond de 81 500€ en 2011) ? Voyez l’échange de commentaires qui suit cet article pour comprendre la problématique et renseignez-vous personnellement pour obtenir l’information qui correspond exactement à votre situation.

Edit : Si vous n’exercez pas d’autre activité indépendante que celle d’auteur, vous devez normalement vous voir attribuer le code APE 9003B « autres créations artistiques », qui inclut les écrivains, et être soumis au régime des BNC des professions libérales.

Si vous choisissez un autre statut que celui de l’auto-entrepreneur, à vous de trouver les correspondances adéquates sur le site de l’AFE, qui a l’avantage de tout lister de façon claire.

Je précise dès à présent (nous y reviendrons plus bas) que le statut d’auto-entrepreneur implique deux éléments importants : une imposition sur le revenu et un statut de travailleur non-salarié.

Cas particulier des fonctionnaires :

Fonctionnaires et agents de droit public, l’article 25 de la loi n° 83-634 (voir le texte) vous autorise désormais à exercer une activité annexe sous réserve d’y être autorisé par la commission de déontologie, autorisation valable 2 ans et pouvant être prolongée d’un an. Au terme de la troisième année, vous devez devez choisir entre la fonction publique ou renoncer à l’activité annexe. Les règles changent légèrement si vous êtes à temps partiel de moins de 70 %.

Heureusement, une autre disposition du même article vous libère de ces entraves lorsqu’il s’agit d’activités artistiques : « La production des œuvres de l’esprit au sens des articles L. 112-1, L. 112-2 et L. 112-3 du code de la propriété intellectuelle s’exerce librement, dans le respect des dispositions relatives au droit d’auteur des agents publics et sous réserve des dispositions de l’article 26 de la présente loi. » (Article 26, par lequel vous êtes tenu au respect du secret professionnel).

Quelle différence avec le statut juridique de l'auteur édité ? En savoir plus...

L’auteur édité par des tiers pour tous ses écrits a le statut officiel de « artiste-auteur », qui s’auto-suffit (sauf s’il exerce en parallèle des activités indépendantes, ce qui entraînera alors un double statut).

Il répond aux critères fixés par la loi, qui sont (extrait du texte) :

« Professionnel qui exerce à titre indépendant une activité de création :

– d’œuvres littéraires et dramatiques,

– musicales et chorégraphiques,

– audiovisuelles et cinématographiques,

– photographiques,

– de logiciels,

– ou d’œuvres graphiques et plastiques.

La production de l’artiste-auteur doit relever des œuvres d’art, c’est-à-dire des créations originales réalisées par l’artiste et produites en nombre limité, ou de la cession de droits d’exploitation sur les œuvres.« 

L’artiste-auteur n’a donc pas besoin d’avoir un statut juridique indépendant pour son activité d’écriture, puisqu’il dépend d’un autre organisme en ce qui concerne ses cotisations obligatoires : l’AGESSA.

Ce point sera complété et précisé dans la partie suivante… 🙂


Le régime et les cotisations sociales

Partons donc du postulat que vous êtes auteur auto-publié avec un statut d’auto-entrepreneur (activité libérale ou commerciale, suivant le code APE qui a vous a été attribué lors de l’enregistrement de votre demande – voir les commentaires qui suivent cet article pour comprendre pourquoi il est délicat de trancher).
Edit : l’activité est bien libérale si vous avez le code APE 9003B.

Vous payez vos cotisations sociales à l’Urssaf selon les modalités du régime micro-social dont vous dépendez.

Vos cotisations sont payées mensuellement ou trimestriellement, sur la base de votre chiffre d’affaires correspondant, et vous n’avez donc pas d’argent à avancer.
Consultez la fiche explicative de l’AFE pour en savoir plus sur les particularités du régime micro-social.

Quelle différence avec le régime social de l'auteur édité ? En savoir plus...

L’auteur bénéficiant du statut officiel de « artiste-auteur » cotise auprès de l’AGESSA, selon certaines conditions bien spécifiques.

Les particularités du régime sont présentées sur cette page, ainsi que dans cette fiche récapitulative.

Et, comme le stipule bien l’AGESSA sur son site : « La perception de droits d’auteur et l’affiliation à l’AGESSA sont compatibles avec toutes autres activités professionnelles. Le statut d’ « auto-entrepreneur » peut concerner des activités artistiques (auto-édition, prestation de services…) mais il ne vise pas vos activités d’auteur. Les revenus d’auteur ne relèvent pas du régime de l’ « auto-entrepreneur ». Si vous avez un statut de travailleur indépendant ou d’auto-entrepreneur pour certaines de vos activités, il vous faudra cotiser également au RSI ».


La déclaration des revenus

En tant qu’auteur auto-publié auto-entrepreneur (ça fait beaucoup d’ « aut », tout ça !), vous pouvez opter pour le « versement fiscal libératoire » et payer vos impôts mensuellement ou trimestriellement, le calcul des sommes dues se faisant alors au fil de l’eau, sur la base de votre chiffre d’affaires, comme pour vos charges sociales.

Encore une fois, voyez la documentation officielle pour décider si cette option est avantageuse pour vous ou pas, en fonction des éléments personnels de votre foyer fiscal (notamment les revenus de votre conjoint).

Mais une grande question récurrente taraude les autos-publiés… les revenus doivent-ils être déclarés en BIC (Bénéfices Industriels et Commerciaux) ou BNC (Bénéfices Non Commerciaux) ?

Sur ce point, je vous donne l’information qui m’a été communiquée initialement, lorsque je me suis enregistrée il y a quelques années, à propos de l’activité d’écriture : elle rentrerait dans la catégorie des BNC, puisque c’est une activité « libérale » et non « commerciale ».
(Le Conseil d’État donne deux critères pour vérifier que l’activité est libérale : la personne la pratiquant ne doit pas avoir le statut de commerçant et il doit y avoir prépondérance de l’activité intellectuelle).

Edit : avec le code APE 9003B, votre activité est libérale et vous déclarez bien vos revenus en BNC.

Si vous avez suivi le chemin proposé par ce dossier et que vous ne vendez votre livre qu’en numérique et via Create Space pour la version papier, vous ne faites pas de commerce au sens strict du terme (achat/revente de produits) mais diffusez simplement une œuvre de l’esprit payante : vous êtes donc censé déclarer vos revenus en BNC.

Mais, une exception est théoriquement à envisager, puisqu’elle s’apparente à du commerce : celle où vous achetez des exemplaires de vos livres pour les revendre manuellement (auprès des librairies, notamment), en faisant donc des bénéfices commerciaux.
Dans ce cas, le chiffre d’affaires relatif à cette partie de votre activité d’auto-publié doit normalement être déclaré en BIC, alors que le reste relève des BNC.

Ceci dit, si vous achetez/revendez manuellement vos propres livres à certains distributeurs physiques, mais que les bénéfices retirés sont faibles, il est parfaitement admis que vous les intégriez tout simplement dans vos BNC avec le reste de vos ventes numériques (pour ne pas devenir dingue, les exercices comptables n’étant pas les mêmes dans les deux cas..).

Edit : avec le code APE 9003B, la vente de vos propres livres, qu’elle qu’en soit la forme, relève bien des BNC également.

Notez aussi que les auteurs bénéficiant de ce code APE sont exonérés de la cotisation foncière des entreprises (voir le texte officiel).

Encore une fois, si vous avez un doute et que votre situation personnelle diffère des exemples donnés ici, comme vous pouvez par exemple le constater dans l’échange de commentaires qui suit cet article, c’est l’Administration qui pourra vous dire quoi faire dans votre cas personnel… 🙂

Elle est d’ailleurs la première à reconnaître qu’il est parfois compliqué de savoir quel régime doit être appliqué, comme expliqué dans cette notice officielle, qui présente les modalités de qualification catégorielle des revenus et que je vous engage à consulter.

Quelle différence avec la déclaration de revenus de l'auteur édité ? En savoir plus...

L’auteur édité bénéficiant du statut officiel de « artiste-auteur » bénéficie d’un mode de déclaration des revenus assez similaire à celui de l’auteur indépendant auto-publié… avec quelques avantages supplémentaires, puisqu’il s’agit officiellement de « droits d’auteur ».

Retrouvez tout le détail des dispositions dans cette fiche officielle.


Récapitulatif

Vous avez mal au crâne ? 🙂
Pas de panique, voilà un tableau qui synthétise l’essentiel à retenir, en comparant notamment la situation de l’auto-publié, avec statut d’auto-entrepeneur, et de l’édité, avec statut d’artiste-auteur :

Auteur auto-publié
Auteur édité (y compris via sa propre structure d’édition, comme une SARL ou une association)
Statut juridique :
Auto-entrepreneur (ou autre forme d’entreprise unipersonnelle)
(Edit : les auteurs qui n’ont pas d’autre activité indépendante doivent normalement obtenir le code APE 9003B)
Artiste-auteur
Cotise auprès de :
Urssaf ou RSI, selon le régime concerné (libéral ou commercial) (via la déclaration mensuelle ou trimestrielle) / Cotisations indexées sur le chiffre d’affaires déclaré.
(Edit : pour le code APE 9003B, il s’agit d’un régime libéral, donc de l’Urssaf)

– Est automatiquement assujetti à l’Agessa pour les cotisations obligatoires, via un précompte effectué par l’éditeur ou le diffuseur (peut aussi demander à cotiser de lui-même pour ne pas avoir de retenues sur les droits d’auteur qui lui sont versés).

– Peut ou doit s’affilier à l’Agessa pour les cotisations vieillesse (si conditions d’affiliation remplies) en complément.

Revenus déclarés en tant que :
BNC ou BIC, selon le régime concerné (libéral ou commercial) / Option possible de prélèvement fiscal libératoire, afin de payer ses impôts tous les mois ou trimestres, en fonction du chiffre d’affaires déclaré.
(Edit : pour le code APE 9003B, les revenus sont bien à déclarer en BNC / il y a exonération de la cotisation foncière des entreprises)
Traitements et salaires ou BNC (selon situation et demande particulière de l’auteur) / Bénéficie d’un étalement possible des impôts sur 5 ans, afin de répondre aux particularités des revenus irréguliers.

 

Voilà donc ce qu’il faut retenir des informations légales et fiscales pour chaque cas, en sachant que le choix d’une structure dédiée à votre activité d’écriture aura des avantages (l’auteur percevra des droits d’auteur) mais que l’entreprise elle-même sera soumise à une fiscalité.

Une activité modeste d’écriture se suffit donc d’un statut d’auto-entrepreneur, amplement suffisant tant que le plafond (32600€ ou 81500€ à ce jour, selon le régime) n’est pas dépassé et n’appelle pas une usine à gaz… votre bon sens vous dictera le choix à faire.

Bien sûr, si vous êtes parallèlement salarié ou artisan, tout ça va compliquer vos déclarations de revenus et la somme de vos cotisations, parfois confondues… mais parfois bien distinctes.

En bref, si vous ne vous sentez pas le courage d’étudier tout ça et de faire le nécessaire, confier votre livre à une structure d’édition indépendante est peut-être la meilleure solution.

Dans de prochains articles, nous parlerons du marketing de vos livres, l’objectif de toute cette débauche d’énergie étant quand même (ne l’oublions pas !) que vous ayez des lecteurs.

En espérant que cette partie 7 vous aura rendu service, je vous dis donc à bientôt ! 🙂

Hélène

Article édité le 14/09/15 : Pour donner suite aux échanges que vous pouvez lire dans les commentaires à la suite de cet article, j’ai fait quelques recherches supplémentaires (notamment retrouver mon APE personnel et son libellé).

Il apparait donc que (dans le cas de l’auteur qui ne fait rien d’autre qu’écrire et diffuser ses propres livres), il s’agit bien d’une activité libérale non-commerçante, dépendant du code APE 9003B « autres créations artistiques », qui regroupe entre autres écrivains et compositeurs de musique (voir la fiche de l’INSEE pour en savoir plus).

A ce titre, les revenus de l’activité sont bien à déclarer en BNC, avec un abattement forfaitaire de 34% pour les frais professionnels.

Le reste des informations données précédemment reste valable.

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